Anora de Sean Baker

ANORA

de Sean Baker

Anora de Sean Baker raconte l’univers d’Anora, une strip-teaseuse d’une vingtaine d’années interprétée avec brio par Mikey Madison. Se faisant appeler Ani, elle choisit ce pseudo comme un moyen de se réinventer et de se protéger des dangers qui l’entourent.

L’histoire prend un tournant lorsque le patron d’Ani lui demande de se rapprocher d’un jeune Russe, Vanya (Mark Eidelstein), qui, partageant sa langue, semble offrir une opportunité singulière. Après avoir bénéficié d’un traitement VIP, Vanya lui propose de coucher avec lui dans son luxueux manoir. Il s’avère que Vanya est le fils d’un oligarque, dépensant avec enthousiasme l’argent de ses parents restés en Russie.

L’introduction d’Ivan crée un contraste marquant. Pour Anora, il représente à la fois une forme de sécurité et une échappatoire, mais également une naïveté déconcertante qui remet en question sa perception du monde. La dynamique entre Anora et Ivan est l’un des points forts du film, mettant en lumière une relation fascinante et tragique qui illustre les illusions et désillusions des rêves d’ascension sociale et de romance. Bien que présenté comme un « chevalier en armure brillante », Ivan incarne aussi les dangers de l’irréalité, rappelant que le bonheur ne se résume pas à la richesse ou au statut.

Réalisé avec une sensibilité aiguë, Anora dépeint une femme intelligente, indépendante et résiliente, évoluant dans un environnement où pouvoir et vulnérabilité coexistent constamment. Le film met en avant ses luttes internes et les compromis qu’elle doit faire, soulignant la tension entre ses aspirations et les limitations imposées par son milieu.

Les interactions d’Anora avec ses collègues et clients révèlent les multiples facettes de la féminité et les choix cruciaux que les femmes doivent faire dans un monde où leur valeur est souvent réduite à leur apparence. Le film réussit ainsi à offrir un portrait nuancé de la sexualité et de l’autonomie, où le corps d’Anora devient à la fois un outil de pouvoir et une source de vulnérabilité.

Brooklyn, quant à elle, est présentée comme un personnage à part entière : vibrante et vivante, mais aussi impitoyable. Les scènes de danse, à la fois sensuelles et puissantes, capturent la maîtrise d’Anora sur son art tout en soulignant les enjeux émotionnels qui l’accompagnent.

Dans un cinéma contemporain où les récits de femmes fortes et indépendantes se multiplient, Anora se distingue par sa capacité à explorer la complexité des choix féminins dans un monde souvent hostile. Le film réussit à capturer les nuances de la vie moderne d’une femme, oscillant entre indépendance et dépendance, rêve et réalité.

La force du récit réside dans la construction d’Anora en tant que personnage complexe et attachant, dont le parcours résonne avec quiconque a déjà cherché à s’extirper des contraintes imposées par la société. Ce long métrage s’impose donc comme une œuvre originale à découvrir.

Nhân NGUYEN DINH